The Teaching of French Civilization 50.574 - Fall 2001 |
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Exercices de prononciation
Nouvel Observateur N° 1793
Le français de là-bas
Si Proust avait été québécois...
Savez-vous enfirouaper des overalls, jouer
de l'égoïne, manquer un taraud, faire sa pintade et Pâques
avant les Rameaux ? Explications
Si Marcel Proust avait été québécois,
il eût écrit au début d'« A la recherche du temps
perdu » : « Ça remontait à l'année
du siège que je me cantais avec les poules. »
Il n'eût pas attendu avec moins d'anxiété le baiser
du soir, qui devait lui
permettre d'avoir l'endormittoire, alors que la famille,
en bas, parlait au chapeau (allongeait la conversation) et se
bourrait comme un ours (s'empiffrait). C'est qu'il n'était
pas vieux comme les pierres, le petit Marcel, il pouvait passer en
chapeau de castor sous le poêle, il était
encore un p'tit gars à Maman. Comprenant que sa mère ne viendrait
pas, il
aurait fait de son best pour lui écrire un mot
gentil, qui ne lui aurait valu hélas que de recevoir une pine (une
réprimande). Il aurait le pesant (il ferait des
cauchemars), officiel (sûr) ! Le lendemain il aurait eu le coq à
terre (il aurait
été fatigué) ; il aurait enfirouapé
ses overalls (enfilé sa salopette), et, quitte à manger sa
grappe (se faire gronder), il aurait
lu toute la journée un des ces livres que sa grand-mère
lui offrait à pleines culottes (en quantité). Peut-être
se serait-il
traîné le cul à la journée
longue (aurait-il flâné), et, devant quelque fraîche
paysanne, devenu orignal (mot que
Françoise prononçait « original »
et qui signifie : se serait excité), dans le cabinet sentant l'iris,
se serait tiré une botte à
l'oeil (masturbé), autrement dit, selon Françoise,
aurait joué de l'égoïne, fait du fromage, ou, plus exactement,
son lavage
à la main, expression qu'ignorait Odette de Crécy,
cette agace-pissette (allumeuse) qui avait de belles sacoches (de
beaux seins), mais n'était pas la tête à
Galilée, et préférait dire « se polir le shaft
» ? plus chic). Si Proust avait été
québécois, il aurait raconté qu'Albertine
lui était tombée dans les talles (l'avait séduit),
au point de lui faire manquer un
taraud (perdre l'esprit), et de le rendre jaloux comme
un pigeon, comme un becsie. Autant que Swann, qui suivait Odette
comme une vraie queue de veau (à la trace). Ce
qui n'était pas le cas de Charlus, ce senteux de pet (homosexuel),
surtout à la fin, quand il était devenu
gros comme une balloune, et que Marcel s'était fait rabattre le
canayen par cette
pinotte (rabroué par ce rien du tout) : quelle
fifarlagne (colère) ! Albertine, c'était une autre paire
de bretelles ! Il lui
faisait des cadeaux qui lui coûtaient un bras. Pourtant,
il n'avait pas le paquet (n'était pas riche). Elle était
longue sur la
branche (grande), elle était vraiment un beau patron
(belle). On ne peut pas dire qu'entre eux ça marchait comme une
pipe neuve, et ils avaient souvent des piques (se disputaient).
Elle faisait sa pintade (prenait des airs), l'arrangeait en
petite culotte (le trompait), mais enfin elle était
quelqu'un de parlable. Et avec elle il avait fait Pâques avant les
Rameaux (l'avait prise avant le mariage) ; encore qu'on
n'en soit pas certain. Comme on peut le voir, accommodé à
la
sauce québécoise, le français en
général et le marcelproust en particulier vous prennent des
airs d'une admirable
familiarité et d'une incomparable vigueur. Le parler
populaire québécois est fringant, voilà la vérité.
Gloire au québécois.
jacques drillon « Dictionnaire des expressions
québécoises », par Pierre DesRuisseaux, Bibliothèque
québécoise, 448 p.,
48 F. « Trésor des expressions québécoises
», par Pierre DesRuisseaux, Fides, 334 p., 138 F. « La Langue
et le nombril,
histoire d'une obsession québécoise »,
Fides, 306 p., 138 F.
Nouvel Observateur N° 1780
Les réponses au quiz
De bon aloi (« de bonne qualité ») :
dérivé du verbe « aloier » qui signifiait «
fondre un alliage ». Une pièce de « bon aloi »
était une pièce de valeur, fondue avec des
métaux précieux. Sans ambages (« sans détours
») : vient du latin ambages qui
désignait une démarche sinueuse. Aujourd'hui
l'expression ne s'applique plus qu'aux détours du langage. Avoir
le coeur qui
bat la chamade (« qui bat très vite »)
: la « chamade » était un roulement de tambour militaire
ou une sonnerie de
trompette. Lorsqu'un assiégé voulait se
rendre, il le faisait savoir au camp adverse en « battant la chamade
». Dans son for
intérieur (« dans le secret de sa pensée
») : vient du latin forum dans le sens de « tribunal ».
Le « for intérieur » était « le
tribunal de la conscience ». Par opposition au «
for extérieur », « le jugement de la société
». Boire à tire-larigot (« en
grande quantité, énormément »)
: « à tire » signifiait « sans arrêt, d'un
seul coup ». Un « larigot » était une flûte.
Le «
tire-larigot » serait le flûtiste qui, à
l'époque, avait une solide réputation d'ivrogne. A la queue
leu leu (« l'un derrière l'autre
») : le mot « leu » voulait dire «
loup » autrefois. L'expression signifie « le loup à
la queue du loup », pour désigner les loups
qui se suivent. Il y a belle lurette (« il y a bien
longtemps ») : vient du mot « heurette » qui était
une « petite heure ».
Autrefois, on disait « il est parti depuis une belle
heurette » c'est-à-dire depuis une bonne heure. A l'usage,
l'expression s'est
transformée en « belle lurette ». D'ores
et déjà (« dès maintenant, désormais
») : variante ancienne de l'adverbe « or ». La
coordination des deux synonymes « ores » et
« déjà » est un tour stylistique courant (cf.
« au fur et à mesure » ou « bel et
bien »), il renforce l'expression. Mener une vie
de patachon (« une vie dissipée ») : un « patachon
» était un conducteur de
patache, une mauvaise diligence qui secouait beaucoup
ses passagers. Le « patachon », toujours sur les routes, menait
une
vie assez agitée. Dès potron-minet («
dès l'aube, dès le petit jour ») : à l'origine,
on disait « dès potron-jacquet ». Dès que
l'écureuil (le « jacquet ») se lève,
il montre son derrière (le « potron », qui vient du
latin posterio, postérieur). Dès que l'on
aperçoit son derrière, cela veut dire qu'il
fait jour. L'écureuil a ensuite été remplacé
par le chat.n
L'EXPRESSION FRANÇAISE ÉCRITE ET ORALE
(Corrigés des devoirs)
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